lundi 26 mars 2012

Cécité politique ou Cécité stratégique ? Par Ngor Diouma Dione, Sociologue.

Ngor Diouma Dione

Sociologue Spécialiste des organisations

Encore des explications politiques de faits essentiellement sociaux ! L’importance du taux d’abstention, la défaite  de Wade dans certaines localités,  tout est mis sur le compte de défaillances de stratégies politiques. Dans la logique de nos politiciens, il y a deux catégories de sénégalais : les militants qui sont avec nous et les militants des autres. Cette configuration bipolaire de la population sénégalaise fausse toutes les analyses de nos politiciens.  En effet, ils omettent  la grande majorité des sénégalais (ceux que je nomme  le peuple incolore, non-affilié, endurant et silencieux) qui, en réalité, fait le jeu politique.
L’abstention : Par essence le militant n’est pas abstentionniste, son degré d’implication dans les choses du parti ne lui permet pas de rester  chez lui le jour du vote.  Et le militant du camp adverse, aussi déterminé que nous  n’envisage pas de ne pas voter. « Nos militants n’ont pas voté », relève du non-sens.
Dans notre contexte actuel,  l’abstentionniste du premier tour, s’il n’a pas perdu sa carte, appartiendrait surtout au troisième type ignoré par nos apprentis politiciens. Et, son comportement est surtout à mettre sur le compte du dégoût,  de la mésestime ou de ce sentiment de répugnance à l’égard des hommes politiques et de la chose politique dans sa forme actuelle. Malheur à celui qui, parmi ceux du pouvoir, osera le réveiller. Sa main sera lourde et son vote achèvera son mentor.
La défaite : « nos responsables n’ont pas battu campagne »  cette affirmation se base sur une vision passive de l’électorat qui est considéré comme une masse inerte qui attendrait d’être convoyée ou d’être orienté  (parfois, par un supposé marabout) vers la poche d’un candidat. Cette perception du votant, si elle est vraie, elle ne  l’est  que dans une infime proportion de cas.
Dans le contexte sénégalais, le poids qui fait basculer la balance dans le sens de la victoire ou de la défaite n’est pas le militant mais ce peuple ignoré, incolore, non-affilié, endurant et silencieux. Ce peuple qui a oublié la couleur du lait. Ce peuple qui achète le morceau de sucre à 05frs la pièce. Ce peuple dont la bouteille de gaz ne s’épuise jamais au bon moment. Ce peuple qui donne son salaire à la Senelec pour emprunter de quoi vivre. Ce peuple dont l’année scolaire ne commence véritablement qu’en fin d’année… C’est ce peuple  qui fait gagner ou perdre.
Dans cette mi-temps, beaucoup de politiciens affiliés au pouvoir se refugient derrière cette vision de l’électorat  pour faire des appels de fonds en direction de leur parti. Beaucoup d’entre eux sont loin d’être politiquement aveugles. Leur cécité n’est que stratégique. En effet, avec la débâcle  de leur candidat et la déconfiture inévitable du parti pathologiquement monocèphale, les fonds captés ne serviront qu’à atténuer  les lendemains douloureux qui devront faire suite à la gabegie insolente dont ils sont habitués.
Après l’avoir dévié du chemin du véritable SOPI en l’entrainant dans les voies d’une véritable SOPALIKU, après l’avoir emmuré  et éloigné du peuple, les faucons associés aux vautours sont entrain de roder autour de leur candidat agonisant ! Le peuple lui a définitivement tourné le dos.
Ce peuple ignoré, endurant et silencieux, comme le vent en mer, poussera tout piroguier allant dans son sens et fera chavirer toute embarcation aventurière lui faisant face.

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