lundi 5 mai 2014

Lettre (inédite) de THOMAS SANKARA, le jour de son assassinat



« C’est un document historique et inédit. Le message que devait lire Thomas SANKARA le 15 octobre 1987 n’a jamais été lu et n’a jamais été rendu public. Cette lettre manuscrite de 10 pages que nous avons retrouvée ; plus de 23 ans après l’assassinat de son auteur, offre un saisissant éclairage sur l’état de délitement de la révolution.
L’authentification du document ne présente aucun doute, son écriture, sa signature non plus. Preuve supplémentaire, l’un de ses plus proches amis ; Valère SOME ; qui était présent dans son bureau quelques heures avant sa mort, s’en est fait lire un extrait par le président du Faso. Il restitue de mémoire cet extrait dans son ouvrage, Thomas Sankara, l’espoir assassiné en 1990. Ce passage se trouve dans la lettre que voici dont je publie l’intégralité :
Le 15 octobre 1987
Chers camarades,
Le prestige de la révolution et la confiance que les masses lui vouent ont subi un grand choc. Les conséquences en sont une remarquable perte d’enthousiasme révolutionnaire chez les militants, une sérieuse diminution d’engagement, de la détermination et de la mobilisation à la base, enfin, la méfiance, la suspicion partout, le fractionnement au sommet.
Quelles en sont les causes ?
Il y a d’une part ce qui pourrait nous diviser et qui relèverait des questions profondes de fonctionnement des structures, d’organisation de la vie interne du CNR, des positions idéologiques et il y a d’autre part des questions de rapports humains entre les acteurs, animateurs que nous sommes tous. Mais, pour importantes que soient les questions organisationnelles et idéologiques, elles se révèlent dans notre cas avoir moins déterminé la situation présente.
En effet, toute organisation connaît en son sein, un affrontement des contraires puis une unité de ces mêmes contraires. « L’unité des contraires est en conséquence absolue, exactement comme le développement et le mouvement sont absolus ».
C’est pourquoi l’équilibre est lui-même temporaire. Il peut être à tout moment remis en cause. Il nous revient de travailler à l’assurer, à le préserver le plus longtemps possible, à le rétablir chaque fois qu’il aurait été menacé, voire rompu.`
Dans le cas des questions fondamentales, organisationnelles et idéologiques, nous avons bénéficié du fait que chaque fois que nous avons estimé devoir émettre un point de vue différent du mien, défendre une position contraire à la mienne, vous l’avez fait en toute liberté et en toute confiance. Je l’ai adopté et appliqué, de même que les conseils, suggestions et recommandations. Du reste, et en règle générale, la résolution des questions entre les hommes est toujours aisée dès lors que règne la confiance. C’est dire que tant que la révolution sera régie par des principes, le débat franc, la critique et l’auto critique suffiront à dissiper tout malentendu, tout désaccord pourvu que s’impose la confiance.
Travaillons donc à développer la confiance et préservons-la de toute critique, de toute menace. A l’inverse des questions de principe, dont la résolution s’appuie aisément sur la confiance, les problèmes de rapports humains, subjectifs ne connaissent rien d’autre comme solution que la confiance totale. En cela, les intrigues de certains éléments de nos rangs ont fait plus de torts, plus de ravages en quelques mois, que des années des plus farouches affrontements politiques et idéologiques entre le CNR et des organisations adversaires de gauche.
Prenant leur appartenance au CNR comme la garantie inattaquable de leur label de révolutionnaires, ces éléments se sont crus la voie royale ouverte pour la réalisation de leur vision de la société, de la place qu’ils entendent jouer, du rôle qu’ils s’y assignent. D’un côté, la surenchère verbale de gauche, de l’autre une pratique de voyou. Tout cela dans la tranquille assurance que le CNR les prémunit contre toute attaque et que le parlementarisme de ce même CNR leur a ouvert des droits de minorité de blocages.
Ces droits, ils les utiliseront abusivement pour couvrir tous ces comportements licencieux indignes de militants révolutionnaires, mais que personne ne leur opposera sous peine d’être soupçonné de vouloir s’opposer au CNR.
C’est de l’opportunisme ! A l’intérieur, le souci de ne perdre aucun militant, surtout les nouveaux venus, a plutôt nui à la fermeté et annihilé toute rigueur contre ce que chacun constatait comme étant de l’indiscipline et un discrédit préjudiciable à terme à l’autorité du CNR.
Tout le monde est témoin du dilettantisme, de la légèreté qui ont caractérisé les comportements d’éléments de cet acabit, et émaillé leur pratique sociale et militante. Le titre de membre du CNR a été utilisé par eux pour influencer les masses à des fins personnelles contraires aux intérêts de la révolution. Mais le plan criminel de leurs attitudes, c’est la paralysie de la Direction qu’ils ont provoquée en travaillant sans relâche à créer l’impression qu’ils se sont identifiés à certains dirigeants éminents incontestés parce que respectables et respectés. Dès lors, et sous ce couvert, ils pouvaient imposer et leur caprices et leurs indisciplines sans crainte d’aucune mesure. Ils se sont autorisés toutes sortes de pratiques sociales, couverts qu’ils se sont estimés de l’immunité de « proches copains » de tels ou tels dirigeants. Leur position élevée dans les structures du CNR aidant, positions tirées non d’un mérite établi mais d’une répartition arithmétique entre groupes au CNR, ils ont de fait maquillé de vraisemblance leurs intrigues.
La révolution a beaucoup souffert de ces éléments là.
Incapables d’élever le niveau des débats, ils l’ont tiré en arrière. Ils l’ont rabaissé.
Redoutant l’unité comme étant la fin de leurs « droits princiers de naissance », ils ont démobilisé partout où il y avait ne serait-ce qu’une certaine adhésion, et ailleurs ils ont jeté de l’huile sur le feu de la division.
Progressivement démasqués dans leurs pratiques et objectivement et inexorablement engagés sur la pente qui les mène à leur perte, ils recourent de façon de plus en plus grossière, mais de plus en plus assassine à la division de nos rangs, à l’opposition artificielle des dirigeants. Ainsi, ils détournent l’attention vers d’hypothétiques dissensions au sommet, pendant qu’ils se dérobent à leur devoir de ressaisissement et d’autocritique.
Ne cherchons pas loin. Le malaise actuel est la conséquence des comportements criminels non dénoncés parfois, non promis ? toujours. S’il y a opposition, ce n’est nullement entre ceux là que l’on indexe : « les dirigeants historiques ». S’il y a opposition, c’est bel et bien entre ces éléments intolérables, incompatibles avec la rigueur révolutionnaire et la fermeté qui nous est dictée par l’obligation de toujours approfondir le processus déclenché depuis le 4 août 1983.
Le résultat de ce travail égoïste (lutter rien que pour soi au point de compromettre l’intérêt général) est que nous sommes affaiblis, en tout sérieusement ébranlés. Les rumeurs les plus folles ont embrasé les masses. L’opinion s’en émeut et s’en inquiète. La panique généralisée prédispose aux actions les plus insensées… que faire quand on est à ce point désespéré ! Gagnée par l’inquiétude généralisée, la direction politique se retrouve désemparée du fait que l’origine du mal est diffuse, et que la thèse de l’opposition, quelques dirigeants de premier rang ne convainc pas, quoique commode aux regards de la tradition de lutte aux sommets chez les vieilles gardes politiques d’ici. D’ailleurs ceux là mêmes qui ont donné pour être des responsables en querelle s’interrogent vainement sur ce qui pourrait être le motif de leur opposition. Le danger, c’est que l’on est obligé de s’inventer une explication et une justification plausible, tant il est répété partout qu’il n’y a « pas d’entente entre les dirigeants. »
Jamais un point d’antagonisme ne nous a opposé. Qu’il y ait eu divergence sur des points donnés, cela est courant.
Même la liberté, la confiance des débats entre nous qui exclue toute inutile retenue et faux tabous n’ont pas relevé un quelconque antagonisme qui justifierait ou expliquerait une si subite et hypothétique mais persistante rumeur d’opposition.
Ces rumeurs aidées par le désarroi généralisé ont réveillé les possibles de toute sorte d’opposition à la Révolution : les accompagnateurs de la RDP ?
Aujourd’hui dégénérés, les tribalistes, les réactionnaires, les réactionnaires de la droite brute qui reprennent espoir…
Même nos ennemis à l’extérieur retrouvent leur agressivité depuis longtemps émoussée par nos victoires éclatantes, et poussent à l’audace des débris d’opposants réveillés pour la circonstance.
Camarades, nous ne pouvons pas permettre à quelques individus de se jouer de tout le peuple, faire condamner le CNR dans notre Patrie et auprès des peuples qui jusque là respectent notre lutte. Nous ne pouvons pas et ne devons pas laisser quelques éléments irresponsables faire planer sur notre Révolution, le spectre des déchirements tels ceux du Yémen. Nous ne pouvons et ne devons les laisser pervertir cette révolution avec des conséquences, telle l’impasse de Grenade. Nous ne pouvons pas fermer les yeux ou nous embarrasser devant les manquements de quelques intrigants lorsque tout le pays est menacé par la guerre civile à la manière du Liban et du Tchad.
Nous sommes responsables devant notre peuple. Nous sommes aussi responsable devant le mouvement progressiste international du devenir de cet espoir qu’a suscité la Révolution du 4 août 1983…Cessons de nous lamenter à quatre ou devant une situation nationale si triste.
Notre sincérité n’excuse pas notre coupable sentiment d’impuissance qui traduit plus le défaitisme. Je comprends que nous soyons choqués d’être qualifiés de ce que nous ne sommes pas, d’être accusés de ce que nous n’avons pas fait.
Je propose :
/ que nous allions aux masses pour leur démontrer notre cohésion par des meetings de dénonciation et de condamnation des courants divisionnistes, en ridiculisant comme ils le méritent, ceux qui jusque là ont prêché avec plus ou moins de bonheur dans les eaux de la Révolution troublées par eux.
Il y a urgence que nous sortions, que nous parlions, que nous rassurions notre peuple. Il y a urgence.
/ Eliminons de nos rangs les fauteurs de troubles. Toutes les luttes sociales ont connu des aventuriers frauduleusement introduits. L’histoire immédiate ou l’histoire lointaine se sont chargées de les éliminer. Notre révolution avancera en se purifiant. Nous ne perdrons rien à assumer le carnage révolutionnaire sentimentalement ressenti, dans le cas d’éventuelles séparations ne sera jamais rien par rapport à ce que nous endurons en ces jours, ni ce que notre peuple souffre en ces circonstances.
Je proposerai des sanctions.
/ dans les meilleurs délais, il nous faudra mettre en place :
Les statuts du CNR, corrigés au regard de ce que nous enseignent nos difficultés présentes et prévisibles, l’acceptation et l’assimilation de la plateforme et des règlements du CNR seront un critère éloquent à l’adhésion à sa ligne.
Le programme économique, politique, social et militaire du CNR autour duquel nous rassemblerons les révolutionnaires sur la base de leurs mérites à contribuer au bonheur réel de notre peuple.
Le code d’Ethique révolutionnaire qui décrivait la conduite sociale la plus exemplaire vers laquelle chacun de nous devra s’efforcer de tendre.
A l’aide de ces éléments et grâce à une vie organisationnelle qui devrait se départir de l’amicalisme, par un fonctionnement plus efficace de la Commission de Vérification, par des bilans périodiques sur ce que notre action a apporté ou non au peuple, nous parviendrons à faire du CNR actuel et de toute autre forme que prendrait la Direction Politique Nationale, un véritable Etat Major où n’entrent que les meilleurs des meilleurs, les révolutionnaires les plus sûrs.
La Patrie ou la mort, nous vaincrons ! »
Thomas Sankara
Ce document est un extrait de l’ouvrage de Dénis Montgolfier édité à compte d’auteur
Journal burkinabè L’Evènement
evenement-bf.net

mardi 29 avril 2014

Un Peuple qui se trompe (Par A. Aziz Mbacké Majalis)



Rédigé le Lundi 28 Avril 2014 à 20:57 | Lu 3945 fois | 45 commentaire(s)

Comme prévu. Les mourides viennent de réserver un accueil triomphal à l’homme qui a trahi Serigne Saliou Mbacké. Après l’intolérable mélange de genres des pancartes affichant « WADE PARTOUT, WADE FEPP, WADE MERCI » lors de l’accueil à Dakar du président qui a impunément foulé, pendant douze longues années, les principes de vérité, de justice et de droiture légués par Serigne Touba, sa ville sainte vient d’être le théâtre d’un « meeting » mêlant hommes et femmes, manifestant bruyamment à quelques mètres de la grande mosquée. 



Ceci, malgré l’interdiction pourtant réitérée par leur Calife, il y a juste quelques semaines, des manifestations à caractère politique que nous les mourides sommes les premiers aujourd’hui à transgresser allègrement. Du moment que cette transgression s’avère conforme à nos émotions ou à nos intérêts, nul n’y trouve à redire. Il en est désormais ainsi. Les « ndigël » sont sélectivement exécutés. Et dans le sens qui nous arrange. C’aurait été une autre figure politique qui aurait bénéficié de cette « marche bleue mouride » (n’ayant rien à voir, il faut le préciser, avec les accueils calmes et disciplinés auxquels les califes conviaient les populations pour leurs hôtes de marque), des boucliers outrés se seraient certainement levés pour condamner la « profanation » du périmètre sacré. Il est vrai, pris dans le feu des émotions, que nous n’en sommes pas à une contradiction près. 

Mais dans ce brouhaha médiatique, délibérément mis en branle (pour qui sait décrypter le caractère tendancieux et partisans du florilège d’articles bleus pullulant sur le web), il est une grande consolation. A quelque chose malheur est assurément bon. Comme a son habitude, l’ancien président a essayé d’embarquer les religieux, dont le Khalife général des mourides, dans son aventure politique et dans sa mission paternelle. Sans succès. Son slogan de toujours, « Le Petit avant la Patrie », n’a pas eu l’effet escompté à Tawfekh. Donc, tawfeex rekk... Les thuriféraires et autres obligés religieux de l’ancien pouvoir n’ont pas réussi, comme escompté, à mobiliser Serigne Sidy Mukhtar dans la marche bleue de Touba. Puisse le Seigneur nous le préserver et lui accorder une très longue vie. Pour son sens élevé de la dignité, de la mesure, du renoncement au clinquant de cette présente vie, du recul face au factuel passager et de veiller à la sauvegarde constante de l’orthodoxie mouride. En dépit des multiples tentatives de pressions et de manipulations de tout bord. Malgré le « forcing médiatique » de ses propos de bienvenue, de congratulation et de convivialité (teranga) tendant à lui faire coûte que coûte dire ce qu’il n’a pas voulu dire. Serigne Cheikh Maty Lèye est entrain d’assurer avec brio une mission de sauvegarde des valeurs de l’Islam et des principes du Mouridisme dont il a actuellement la charge, en déjouant tous les pronostics de déliquescence fatale avec l’avènement de l’ « ère des petit-fils ». Tous les mourides, tous les sénégalais, tous les musulmans lui doivent encore une fois une fière chandelle. Yàgg fi lool te wer. 

Cette résistance (qui s’avère conforme à sa promesse de « ne jamais céder à une quelconque pression politique, médiatique ou financière » durant son magistère) nous parait d’autant plus justifiée que son récent hôte n’avait pas hésité, durant son mandat, à trahir ses engagements devant son illustre prédécesseur, Cheikh Saliou Mbacké. Tout le monde se souvient en effet des graves et assez récentes révélations de Serigne Moustapha Saliou (dont la véridicité ne saurait être remise en cause) contre Wade, lors de l'affaire Dangote : « Je dois vous révéler que ces problèmes [avec le cimentier nigérian] ont en réalité commencé avec l'ancien régime (de l'Alternance). Je sais, avec une certitude ne souffrant d’aucune sorte de doute, que les tenants de l'ancien régime avaient donné des assurances fermes à Dangoté, en lui disant : « Continue tes travaux et ne te laisse pas distraire par ces marabouts qui ne savent que parler. » Dangote a-t-il ainsi eu la hardiesse de poursuivre ses travaux, malgré notre plainte en justice et les décisions administratives conservatoires qui furent prises à l’époque. « Construis ton usine, et élève-la même jusqu’au ciel si tu veux... », lui avaient alors intimé les tenants de l’ancien pouvoir…» (voir la vidéo sur YouTube :https://www.youtube.com/watch?v=pKGeeTDm4Jo). 

Que tous les condisciples qui se sont massés autour de la grande mosquée et dans les rues de la ville sainte (fondée pour l'adoration exclusive de Dieu et la préservation de la Sunna du Prophète (Psl)), pour soutenir leur « frère mouride », ou se sont engagés à multiplier leurs soutiens sur Facebook, sachent qu'ils le font pour quelqu’un qui considèrent leurs guides comme de « beaux parleurs », quelqu’un qui n’a pas hésité à léser impunément les droits de la famille de Serigne Saliou et qui a trahi ses engagements auprès du saint homme, une fois celui-ci disparu … 

Nous n’avons manqué de sourire, en entendant une partie du « peuple », reprendre le désormais nouveau et ironique slogan à la mode « Baal ñu, da ñoo juum » (Pardonne-nous, nous nous sommes trompés !). Refrain habilement forgé pour matérialiser la nostalgie invétérée de nos concitoyens, face surtout aux déceptions et frustrations suscitées par le régime actuel, en sorte de « tiiñal » à ce régime pour lui manifester son mécontentement. C’est de bonne guerre. Et le régime de Macky gagnerait à bien décrypter le message et à rectifier certains tirs. Il y va de son intérêt et même de sa survie. Mais pas toutefois au point de revenir sur certains engagements forts et objectifs majeurs, comme la traque des biens supposés mal acquis, la remoralisation de la gouvernance politique et la gestion des deniers publics. Tout en évitant (comme cela semble être malheureusement le cas aujourd’hui) les tâtonnements, l’iniquité, la faiblesse et l’extrême frilosité dans la gestion des affaires du pays, car mal conseillé par un entourage loin d’être compétent. 

Mais en écoutant cette partie du peuple crier à tue-tête dans les rues, « da ñoo juum », nous avons été tentés de leur répondre : « Xamleen ne tay jii tamit da ngeena juumaat. Te di ngeen juumati, di wey di juumat li feek du ngeen jiital seen xel ci seen xol. » 

Vous dites que vous vous êtes trompés ? Eh bien, sachez que vous venez encore de vous tromper. Et que vous continuerez encore de vous tromper. Tant que vous mettrez vos émotions au-dessus de votre raison. Tant que vos intérêts particuliers prendront le pas sur l’intérêt général. Tant que vous vous laisserez manipuler par nos politiciens qui exploiteront sans pitié votre émotivité et vos difficultés économiques. 

Et pour rappeler la constance de ces principes, nous ne craignons nullement d’encourir la désapprobation de la majorité de nos condisciples mourides (pourvu que nous obtenions l'Agrément de Serigne Touba), ni même de nous opposer à l'ensemble du peuple. 

Surtout un peuple qui se trompe.

lundi 28 avril 2014

La race d'homme à bannir de notre vie politique! Scandaleux!


Révélation de Souleymane Ndiaye, ministre-conseiller du Président : «J’ai conçu la simulation dans l’assassinat de Me Sèye»

L’affaire Me Babacar Sèye est enterrée. Souleymane Ndiaye la déterre. L’ex-Conseiller juridique de Abdoulaye Wade ressort la stratégie qui a sauvé Abdoulaye Wade, accusé à l’époque d’être le commanditaire de l’assassinat du vice-président du Conseil constitutionnel. Il revendique avoir été celui qui a conçu la thèse de la simulation récitée par Clédor Sène, Pape Ibrahima Diakhaté et Assane Diop, alors que Me Wade, avait perdu toute issue. Le criminologue défie quiconque de prouver le contraire. Ce minis­tre-conseiller, responsable de l’Alliance pour la République, rejette les «mauvais esprits» qui parlent de «galaxie Faye-Sall» dans laquelle d’ailleurs lui-même en serait une illustration. L’officier de gendarmerie à la retraite, qui a fait ses armes à la Cdp/Garab-Gui, à l’Urd et au Pds, avant de rejoindre la troupe de Macky Sall, ne veut pas entendre parler de transhumance parce que lui «ne broute pas». Dans les secrets d’Etat ou détails des secrets, il se confie.
Vous êtes ministre-conseiller du Président, mais peut-on dire que vous êtes aussi militant de l’Apr ?
Evidemment, je suis militant de l’Apr parce que du temps où Macky était dans l’opposition, j’assumais déjà les fonctions de conseiller spécial, ce que beaucoup ne savent pas d’ailleurs. J’ai toujours fait partie du directoire de l’Apr. Donc, que je sois aujourd’hui ministre-conseiller, il n’y a rien d’étonnant. Maintenant de mauvais esprits, experts en propagande délétère voudraient accréditer l’idée d’un soi-disant népotisme au sein du système.
On parle de «galaxie Faye-Sall»
C’est ça. Je connais bien certains partis d’opposition qui sont maîtres dans la manipulation d’opinion.
Vous vous adressez au Pds ou à l’opposition de façon générale ?
Je m’adresse particulièrement au Pds parce qu’on le dit «principal parti de l’opposition». Mais si cela venait du Pds, ce serait irréfléchi de leur part parce que cela voudrait dire que je suis accessible à l’appât du gain et qu’une certaine traitrise m’habite. Si c’était le cas, j’aurais été multimillionnaire avant 2000.
Comment ?
Je précise quand même que depuis l’alternance de 2000, je ne me suis jamais adressé aux médias pour dire quoi que ce soit dans le rôle que j’ai eu à assumer au sein du Pds. J’ai toujours considéré Me Wade comme un ami.
Vous aviez milité au Pds depuis quand ?
C’est depuis début «93». J’ajoute que je ne me suis jamais comporté d’une manière qui puisse lui être nuisible.
Est-ce que ce n’est pas parce que vous avez milité à la Cdp/Garab Gui, à l’Urd, au Pds et aujourd’hui à l’Apr ?
La Cdp, c’est vrai. Il serait peut-être étonnant de voir un ancien officier de gendarmerie plonger dans l’opposition et être aussi actif que moi. Mais en sortant de la gendarmerie, j’avais la ferme détermination de combattre le système qui était en place dont j’ai été victime d’ailleurs. Officier, je commandais la division de la justice militaire et j’ai eu à rédiger la première mouture du code de justice militaire, tout seul. Je quitte le Sénégal, pars pour Paris et reviens avec un doctorat en Droit pénal et Sciences criminelles avec un 3ème cycle en études politiques. Alors on m’affecte à une division fictive, on m’ouvre un bureau lugubre à l’écurie et du 1er janvier au 31 décembre, je ne voyais pas de papiers. Le ministre Médoune Fall avait essayé de remédier à cette injustice et m’avait affecté par arrêté comme son conseiller juridique. La gendarmerie est venue lui dire qu’elle avait un déficit d’officiers et c’est comme cela que je suis retourné dans ce bureau dont je parlais. Et pourtant ce n’est pas parce que j’ai été un mauvais militaire car j’ai la Croix de Guerre, la Médaille militaire et je suis Officier de l’ordre national du lion. Mais j’ai été sanctionné tout simplement parce que j’avais ces diplômes-là. On me harcelait et on me torturait moralement. C’est comme cela que j’ai pris une disponibilité et adhéré à la Cdp. Malheureusement, entre le Pr Iba Der Thiam et moi, il y avait une incompatibilité d’humeur, cause de mon départ du parti en tant que 2ème secrétaire général, en 1993. Le Pds m’a alors sollicité et j’y suis allé pour être le conseiller juridique de Wade.
1993 coïncidait avec l’année chaude de l’affaire Me Babacar Sèye…
Exactement.
 C’est aussi cette accusation contre vous selon laquelle vous devez votre poste à votre fils qui a épousé la sœur de la Première Dame…
C’est le cas, mais son mariage est intervenu bien avant ma nomination. Qu’à cela ne tienne, même si ma nomination était intervenue après ce mariage, par pudeur, ces éléments qui diffusent cette information injurieuse n’auraient pas dû le faire. Si j’étais intéressé par l’appât du gain ou un homme de la traitrise, peut-être qu’il y aurait alternance en 2000, mais ce ne serait pas avec le Pds.
Dites-nous...
(Il hésite) Sans entrer dans les détails, je vais vous donner une preuve matérielle. Je vous renvoie au livre de Latif Coulibaly  qui interrogeait Diakhaté (Ndlr : Pape Ibrahima Diakhaté, un des assassins du juge constitutionnel dans Affaire Me Sèye : Un meurtre sur commande). Quelque part dans ce livre, Diakhaté lui dit que quand ils étaient en prison, l’avocat est venu leur dire de ne plus rien avancer, désormais ils doivent dire qu’ils ont été payés pour faire de la simulation et non pas pour tuer, alors qu’il y avait un cadavre dans la valise. Et je défie quiconque de venir dire que ce concept n’était pas venu de moi.
Un artifice que vous avez sorti…
Bien évidemment. J’en étais arrivé là parce que tout simplement celui qui était à la tête du pool d’avocats…
C’était qui ?
Permettez-moi de ne pas citer de nom.
C’était Me Madické Niang ?
Enfin, je ne sais pas. En tout cas celui qui était à la tête du pool d’avocats était venu dire à Me Wade qu’en désespoir de cause, il ne voyait aucune sortie parce que Clédor était clair dans ses accusations.
Et en ce moment-là, vous étiez conseiller juridique de Wade…
Oui. Donc, ce qui restait à faire c’était plaider coupable. Et là cela aurait été la catastrophe ! C’est donc sur ces entrefaites que je suis intervenu et que j’ai monté le système de défense. Je répète encore que je lance un défi à quiconque de me dire le contraire. J’ai confectionné un document. Quand Me Vergès est venu ici, je suis allé l’accueillir à l’aéroport avec un grand responsable du Pds. Nous sommes allés à l’hôtel Teranga où je suis resté jusqu’à 2h du matin pour le briefer sur le système de défense que j’avais monté. Le jour où l’affaire devait être débattue devant la Chambre d’accusation, l’aide-mémoire qui a servi à l’avocat qui était là-bas, c’est moi qui l’ai confectionné et c’est sur cette base qu’il a plaidé.
Voulez-vous dire que c’est vous qui avez sauvé Me Wade ?
Non je ne le dis pas. J’ai juste confectionné l’aide-mémoire. Il faut savoir de quoi on parle, comment les choses se sont passées pour éviter tous les pièges, sinon il n’y a point de système de défense efficace.
Et comme ça la simulation est passée…
Il fallait convaincre l’opinion. Quand Me Wade m’a posé la question, je lui ai dit : «C’était à coloration politique.» Or un procès politique est un procès d’opinion. Si nous arrivons à convaincre les Sénégalais au point que 9 Sénégalais sur 10 soient disposés à jurer sur le coran que vous êtes victime, je ne vois pas de juge qui puisse vous condamner. Et je pense qu’à terme, 9 Sénégalais sur 10 auraient juré, et volontiers, sur le coran que c’était le Ps qui avait fait le coup.
Et c’était justement le cas dans l’opinion jusqu’avant la grâce accordée aux accusés…
(Il esquive) Donc, à cette époque-là, j’aurais pu avoir des millions.
Des millions venant de qui ?
 Mais venant de ceux qui ne voulaient pas voir Me Wade s’échapper.
Il y a eu donc des tentatives ou des tentations à ce point ?
Bien sûr. (Il insiste)
Que le régime d’alors voulait…
(Il coupe) Non, je ne dirais pas le régime d’alors. En tout cas, j’ai reçu des propositions mirobolantes.
De quel genre ?
«Dites ce que voulez, on vous paie !» Voilà. Je l’ai décliné en leur disant : «Puisque Me Wade a eu confiance en moi au point de me confier des choses qui pourraient lui nuire, je refuse de le trahir.» Quand je suis revenu ici, dans mon quartier (Gibraltar), mes camardes officiers à la retraite qui sont venus me voir m’ont dit : «Bonhomme va chercher une couverture et va te coucher ; tu n’auras plus rien en politique.» Donc, en souvenir de cela, ceux qui m’attaquent devraient avoir un peu de pudeur, savoir que je ne suis pas le genre à me prêter à de telles pratiques.
Si nous prenons les événements du 16 février, j’aurais pu avoir également des millions. Il aurait tout simplement suffi de poser la question de savoir pourquoi le meeting qui avait été prévu le 2 février a été reporté au 16 février ; ceux à qui je parle savent ce que je dis.
Expliquez-nous un peu, c’est pour l’histoire au moins.
(Il esquive) Ecoutez, si je suis resté deux années dehors c’est tout simplement parce que Wade est convaincu, lui et son épouse, que je ne suis pas le genre à trahir. L’honneur est dans les veines.
On peut aussi vous reprocher d’être un transhumant de la Cdp à l’Apr, en passant par l’Urd et le Pds, non ?
Non ! La transhumance, c’est aller chercher de quoi brouter, c’est quitter un parti avec l’intention d’aller chercher mieux. Je fais de la politique par idéal. Vous avez parlé de mon passage à l’Urd en 1998 et c’est parce que j’étais prêt à m’engager dans tous les combats qui, à terme, pouvaient faire partir le Parti socialiste. Quand ils (Ndlr : Djibo Kâ et ses militants) sont sortis parce que le Ps refusait systématiquement de leur délivrer un récépissé et évidemment les empêcher de se présenter aux élections législatives de 1998, c’était encore moi.
C’était vous comment ?
Djibo Kâ est un grand stratège politique, c’est connu de tous. Mais personne ne peut tout maîtriser.
Qu’est-ce qu’il n’a pas su maîtriser ?
C’est moi qui ai trouvé l’idée pour l’Urd d’aller aux élections sous la bannière de Tiaabi Ji avec Talla Sylla. Je l’ai appelé alors qu’il était à Thiès. Nous sommes allés trouver Djibo Kâ au Casino la nuit et c’est là que les négociations ont eu lieu. Et en novembre 1999, à quelques mois de la Présidentielle de 2000, Djibo Kâ a sollicité mon avis. J’ai fait une petite étude et lors de la réunion de son directoire, je lui ai dit qu’il n’aura pas grand-chose parce que l’Afp de Moustapha Niasse va affaiblir son parti. Mais je lui fais plutôt une autre proposition : Bathily Dansokho et Landing ont tous fait une déclaration dans la presse dans le sens d’accepter le leadership de Wade parce que ce dernier a une représentation plus importante à l’Assemblée. Alors je lui ai conseillé de les prendre au mot - parce qu’en ce moment-là il avait 11 députés - en rejoignant la Ca2000 et automatiquement il sera le second de Wade qui va gagner les élections. Par la force des choses, il serait son Premier ministre, mais cela a créé un scandale. On m’a traité de taupe parce qu’on ne peut pas demander à quelqu’un de son envergure d’aller se ranger derrière Wade. Ils ont même organisé un meeting à Kaolack pour me traîner dans la boue. C’est depuis ce jour que je n’ai plus parlé à Djibo Kâ et l’histoire m’a donné raison. Voilà pourquoi j’ai quitté l’Urd.
Et pourquoi vous avez quitté le Pds ?
Venons-en. Après avoir géré le dossier du 16 février, évidemment, il fallait se débarrasser de moi. Un jour, vers 13 heures, alors que j’étais là avec ma famille, mon téléphone fixe sonne. Mon fils décroche et me dit : «Papa, c’est le ministre de l’In­térieur.» Abdourahmane Sow à l’époque. J’ai dit : «Moi ? Je ne le con­nais pas.» Je prends le téléphone et il me dit : «Voilà, M. Souleymane Ndiaye, les renseignements généraux ont découvert un projet d’assassinat contre vous par le Pds et puisque vous étiez un officier supérieur, j’ai reçu des instructions de la Présidence pour assurer votre sécurité. Dites-moi quand vous pourrez venir me voir pour arrêter les modalités. Je vais mettre quatre inspecteurs en civil pour votre protection.» J’ai répondu : «Non, je n’ai pas besoin de protection.»  Il me dit : «Que vous le vouliez ou pas, moi je ferai mon travail.» J’ajoute : «Oui, c’est votre travail de protéger les citoyens.» Il persiste : «Sachez qu’il y aura constamment quatre inspecteurs en civil avec vous.»
Etiez-vous convaincu de l’existence d’un tel projet ?
Un ministre de la République qui le dit, vous ne seriez pas convaincu vous ? Attendez la fin de l’histoire. Je suis allé voir la direction du Pds et je leur ai dit : «Je suis étonné parce que M. Abdourahmane Sow, le ministre de l’Intérieur, m’a téléphoné aujourd’hui pour m’informer d’un projet d’assassinat en gestation ici et contre ma personne.» On me dit : «Oui, mais vous savez, Souleymane, il y a des rumeurs persistantes  disant que vous êtes en train de négocier avec Habib Thiam pour lui vendre des informations.»
C’était en quelle année ?
En 1995, après les événements du 16 février. Je suis allé à Fatick discuter avec ma famille qui me conseille de quitter le Pds, parce que n’ayant pas compris qu’on projette de m’assassiner, avec tout ce que j’ai fait pour le parti et sans un sou. C’est comme cela que j’ai démissionné du Pds tout en disant à Wade que je reste son ami et effectivement je le suis resté parce que chaque fois qu’il y a eu un évènement important comme le départ de Ousmane Ngom, j’ai été sollicité. Et dans cette histoire, c’est son épouse qui m’a appelé pour que je vienne parler à Me Wade. Nous sommes restés dans sa cour jusqu’à 1 h. Je lui ai dit de ne plus répondre aux grands responsables du Pds, de faire ses valises et de partir en France, comme ça les choses vont s’arranger d’elles-mêmes. Je lui avais dit : «Vous savez que c’est Agne (Abdourahim) qui est le président du groupe parlementaire du Parti socialiste et celui du Pds ne peut pas le contenir en votre absence parce que Agne est un tribun. Maintenant il y a Abdou Fall qui vient d’atterrir au Pds, c’est un bagarreur. Il faut en faire votre président de groupe parlementaire, même si cela va provoquer des grincements de dents.» Voilà et Abdou Fall ne sait pas comment il a été propulsé président du groupe parlementaire.
Qu’est-ce que vous cherchiez exactement en le faisant ?
C’est un problème d’efficacité. C’est un ami qui conseille à un ami. Je lui ai proposé ensuite de créer une cellule de réflexion qui lui soumettra des idées qu’il validera ou non à partir de Paris. Il a tout appliqué à la lettre. Quand il est allé en France, toutes les semaines je lui envoyais des Fax. Par exemple, quelque chose de marquant, c’est lorsqu’il a organisé une conférence de presse pour dire que les gens de la Ca2000 étaient des leaders comme lui et lui ont fait l’honneur de marcher derrière lui. Mais ils auraient pu être candidats comme lui parce qu’en ce moment-là, la Ca2000 était menacée.
Est-ce que ce sont des stratégies du genre que vous voulez passer au président de la République surtout dans cette guerre entre lui et Idrissa Seck ?
Non, le Président Macky Sall est un grand stratège.
Dans cette bataille Rewmi-Apr, a-t-il été un «grand stratège» en laissant partir Idrissa Seck et en le considèrant com­me un opposant ?
 Qui connaît le Président Macky Sall, sait qu’il n’a jamais été dans le clair obscur. Vous avez dit qu’il considérait Idrissa Seck comme un opposant, non ! Nos actes parlent plus haut que ce que l’on dit. Je  crois qu’il ne l’a jamais manifesté dans son comportement.
On lui a donc prêté cette déclaration...
 Vous savez qu’on prête tellement de choses aux gens. Moi-même, on me prête de vouloir gagner un poste et de sacrifier mon fils alors que ce n’est pas le cas.
Que pensez-vous du départ de Idrissa Seck de Benno bokk yaakaar ?
A mon avis, Idrissa Seck ne s’est jamais départi de son option présidentielle. C’est une évidence. Maintenant, peut-être qu’il a fait des calculs dans sa stratégie. L’heure a sonné et il fallait qu’il quitte. Il ne serait pas surprenant qu’il y ait quelques remodelages du paysage politique. Je pense qu’il n’a pas agi sur un coup de tête. Il a des conseillers dont l’envergure n’est pas à négliger.
 Ce serait en faveur de qui ?
A mon avis, il était trop tôt pour qu’il quitte la coalition. Maintenant, il y a des éléments que je ne maîtrise pas. Je ne suis pas un devin.
Ne craignez-vous pas que d’autres partent parce qu’on leur a demandé de faire muut mba mott (Taisez-vous ou partez !)?
Il n’y a jamais eu de muut mba mott.
C’est quand même un ministre et membre influent de l’Apr qui l’a dit.
Non, attention, ce n’est pas parce qu’on est ministre qu’on parle au nom du président de la République, même si on est membre de l’Apr. Comme le Président Wade le disait : «Qu’un membre de la périphérie dise quelque chose…» Ça ne peut pas influencer un leader comme Idrissa Seck. Il a affaire au chef de parti. Il est clair que si le Président Macky Sall se mettait à écouter la périphérie de Rewmi, il serait en bagarre avec Idrissa Seck depuis longtemps. Ce qui l’intéresse, c’est Idrissa Seck et ses actes, mais pas ce qu’on lui prête.
Vous êtes de l’Apr et de Fatick. Où se trouve votre base ?
Les partis politiques actuels fonctionnent comme les armées à partir de la guerre froide. Un parti qui ne le fait pas, va véritablement vers l’échec. Il y a des hommes de terrain qui en ont la faculté et il y a la conception centralisée. Comme dans les états-majors, le voltigeur va sur le terrain et les autres réfléchissent. L’homme de  terrain n’a pas le temps de réfléchir, de lire  les journaux et d’écouter les journalistes, d’analyser l’opinion et de revoir la direction qu’il est en train de prendre ou de chercher les éléments intellectuels pour modeler l’opinion en sa faveur. Le parti politique qui ne le fait pas n’ira nullement part. Nous sommes à l’ère des spécialisations quand vous voulez de l’efficacité. La réflexion stratégique requiert des connaissances  pratiques et intellectuelles. Mais il y a quelque chose qui avoisine : l’art. Par  exemple, quand j’ai dit que Wade va gagner, un grand responsable du Ps a éclaté de rire, tout comme c’était le cas au directoire de l’Urd quand j’y avais dit la même chose en 2000.
Alors, est-ce que vous pouvez dire aujourd’hui de Macky Sall qu’il va remporter beaucoup de collectivités locales en 2014 ?
 C’est ma conviction.
Même à Dakar ?
Ecoutez ! Non ! (Il hésite). Je ne veux pas mettre en opposition des partis qui sont des alliés. Le Ps est un allié jusque-là très fidèle et sérieux. Il y a un problème de négociation, de compréhension et de concession réciproque. A mon niveau, je ne peux dire que Dakar sera à celui-ci ou celui-là.
Il y a eu beaucoup de critiques autour de la deuxième mise en demeure de Karim Wade, qu’en pensez-vous ?  
En fait, il y a eu beaucoup de critiques pour rien. La loi de 1981 dit que pour qu’il y ait enrichissement illicite il faut que la personne soupçonnée soit incapable d’apporter la preuve de l’origine licite de ses biens. Mais comment peut-on, en découvrant 99  milliards quelque part, les prendre et mettre le tout sur la table alors qu’on n’a pas demandé à Karim si la somme lui appartenait ou non. Il faut être logique !
Pour la première mise en demeure, Karim avait un mois pour se justifier, pourra-t-il encore le faire alors qu’il est en prison ?
Une somme de 99 milliards, voyons ! Combien de braves pères de famille ont travaillé pour ce pays pendant toute une carrière et qui n’ont jamais tenu un million qui leur appartient. Une seule personne vole une telle somme dans un pays aussi pauvre que le Sénégal où 60% de la population a pour principale préoccupation la subsistance. Cela relève de l’immoralité ! Je ne dis pas que c’est réel, mais ils n’ont qu’à le justifier. Car pour qu’on puisse embarquer cette somme, il faudrait avoir des preuves. Et si Karim est incapable de prouver que cette somme lui appartient, donc l’origine n’est pas licite.
Ses avocats parlent de «vengeance», est-ce votre avis ?
Quelle vengeance ? Mais la loi est là et il a des avocats très compétents. Je sais que Me Wade n’aurait jamais toléré que son fils soit en prison sur la base d’illégalité. En Afrique, d’une manière générale, il suffit tout simplement d’être ministre pour avoir la garantie de vivre éternellement dans l’opulence. Par ailleurs, les hommes politiques occidentaux ne sont pas plus compétents que ceux du Sénégal. Mais ils travaillent parce qu’ils savent qu’ils doivent rendre compte.
Justement, certains assimilent la médiation pénale, comme c’est le cas dans l’affaire Tahibou Ndiaye, à une forme d’impunité garantie…
La loi est l’expression de la volonté nationale, c’est ce qui constitue sa force. Toutefois, aucun individu, à titre propre, ne peut s’y déroger. Et par rapport à l’affaire de Tahibou Ndiaye, c’est lui-même qui a accepté de transiger alors que les autres ont tenu des discours. C’est donc prévu par la loi à travers ses articles.
Il y a une impression qui se dégage selon laquelle c’est le régime qui voudrait casser un adversaire politique comme Karim Wade…
Mais quelle notoriété Karim a au Sénégal ? Malgré tout ceci on en revient encore au rôle de conseiller. Et tout cela aurait pu être évité si son père et sa mère m’avaient écouté. J’ai interpellé, dans une radio de la place, sa mère en lui disant : «Attention, il y a des opportunistes qui ont senti qu’il y avait un filet et qu’il fallait tout simplement activer le désir chez Karim pour ainsi lui faire miroiter la possibilité d’être Président. Mais c’est un faux-filet. Et je ne comprends pas que vous, sa mère, que j’ai connue très perspicace puissiez jeter le seul garçon que vous avez dans la faufilure.» Personne ne m’a écouté en ce moment-là. Et s’ils m’avaient écouté, il n’en serait pas là aujourd’hui. La preuve est là qu’il y a certains qui en ont profité pour s’enrichir à travers l’Anoci. Et à l’endroit de son père, j’ai dit : «Attention, la chance va vous sourire, les portes vont être grandes ouvertes, mais quand il vous arrivera de chercher un bon conseiller, ne prenez jamais quelqu’un qui est venu pour se faire, mais quelqu’un qui s’est déjà fait ou au moins qui est un patriote désintéressé.» Il ne m’a pas écouté et, par conséquent, il est tombé aussi vite qu’il est monté.