Nul n'est indispensable pour servir l’État
Une nouvelle fois, l’opinion publique s’est émue à juste titre des
sommes très élevées versées à quelques haut fonctionnaires de la
magistrature et aussi de l'université, des dirigeants d'agences
pléthoriques sous l'ancien régime. Aussitôt, hommes politiques, leaders
d'opinions, représentants de syndicats prennent des positions tranchées
et formulent des propositions, non préparées, conçues sous le coup de
l’émotion et, donc, inappropriées. Même s’il ne concerne qu’une infime
minorité de cas, le problème posé est réel et il convient néanmoins de
l’analyser avec rigueur. Un dirigeant peut être bénéficiaire de
plusieurs types de rétribution financière : un salaire de base, des
indemnités et avantages en nature selon ce qui est prévu dans la
convention collective qui le régit. Le défunt régime de Wade, n'a cessé
de corrompre certaines catégories professionnelles en leur versant des
prébendes ou en développant parfois la pratique du ″golden hello″, prime
de bienvenue accordée au dirigeant, au ministre ou cadre nouvellement
recruté nommé pour servir le système wadiste.
Entreprendre une telle démarche pour assainir les finances publiques en
s'attaquant à ces actions gratuites parce qu'injustes, le Président de
la République ne peut que rencontrer des résistances et des pourvoyeurs à
l'échec de son action. Il lui incombe une obligation de résultat sans
aucune forme de compromis.
Comprenons-nous bien: le principe de la proportionnalité du salaire par
rapport aux facteurs de l’expérience, de la qualification, de la
formation et de l’ancienneté est évident et ne doit pas être remis en
question. Néanmoins il faut souligner que les haut fonctionnaires ou
cadres ayant bénéficiant de ses émoluments, encore aujourd’hui, pour des
raisons clientélistes, sociologiques, n’ont pas toujours les mêmes
chances de satisfaire, autant que les autres même à l'intérieur de leurs
corps de métiers , à ces caractéristiques individuelles. Ainsi, par
exemple, l'augmentation pour les enseignants de l’université, certains
magistrats, dirigeants d'agence ne découle pas toujours d’un choix
librement consenti mais d'une pratique corruptrice de l'ancien régime;
il constitue, encore aujourd’hui, un obstacle significatif à la
promotion salariale et professionnelle de tous.
Au-delà des montants unitaires de chacune de ces rétributions possibles,
c’est souvent leur cumul qui est choquant, parce que non légitime, même
s’il est légal ou contractuel. En effet, les dirigeants ou
fonctionnaires doivent choisir leur camp : ou bien ils veulent être des
salariés, agents de l'état comme les autres, avec les garanties
associées, ou bien ils veulent se rapprocher de la position plus risquée
du dirigeant-actionnaire, à l’image du chef d’une entreprise
patrimoniale. La pratique des « enveloppes » ou des actions gratuites
vise à ce rapprochement.
S’agissant des montants appliqués à chacune des formes possibles de
rémunération, certaines situations ne sont pas acceptables, dès lors
qu’une inégalité devient une injustice. Les inégalités créées selon le
bon vouloir du « prince » sont inacceptables dans une démocratie moderne
en particulier un pays aux ressources limitées, elles peuvent même
constituer un levier de démotivation. Les injustices, elles, sont non
seulement moralement condamnables, mais sont en outre contre-productives
au regard de la cohésion interne du service public. Les situations
inacceptables concernent les indemnités, les avantages en nature lorsque
le haut fonctionnaire bénéficiaire se voit enfermé dans un cercle de
privilégiés qui vit aux dépens et au dessus des moyens dont dispose la
collectivité. Et surtout ne pas être conscient que l'état sénégalais est
dans une situation de grande fragilité financière voire de banqueroute
relève de la cupidité financière. Les niveaux de salaires lorsqu’ils
atteignent des sommets indécents ou lorsque leur évolution est décalée
par rapport aux ressources fiscales de l'état, aux résultats de
l’entreprise, et les attributions lorsqu’elles sont réservées à un petit
cercle de privilégiés; l'état faillit à sa mission: tous égaux devant
le service public. Le salaire ne peut faire abstraction de la situation
de l’entreprise. Au plan d’une nation et au sein d’une entreprise, une
différence de revenus excessive est insupportable et met en danger la
cohésion sociale.
Le chef de l'état et son gouvernement ont L'obligation de mener une
réelle croisade contre les abus de tous genres afin d'assainir les
finances publiques, visant ainsi à la plus totale transparence dans le
domaine des rémunérations des dirigeants, pour les sociétés où l'état
est actionnaire principal. Tous ceux qui n'acceptent pas de travailler
dans de telles conditions ont le droit d'aller monnayer leur talent
ailleurs. Pour servir l'état nul n'est indispensable. Le Sénégal ne peut
pas se permettre en tant que pays sous-développé sous perfusion
financière, verser des salaires comparables à ceux des pays développés
qui sont ses bailleurs de fonds. Le salaire est fonction de la richesse
produite.
A tous ces concitoyens qui sont réfractaires à un changement drastique
de tels pratiques et comportements, ils sont, en outre, invités par la
pensée sociale et éthique découlant de la croyance religieuse de chacun à
promouvoir en permanence la dignité de toute personne, à commencer par
les plus petits, les plus faibles, les personnes aux revenus les plus
modestes, les personnes sans emploi. Les très nombreux dirigeants qui se
reconnaissent dans ces références et qui acceptent la transparence, se
forgent une éthique personnelle, qui les invite à s’interroger en
permanence sur le risque d’injustice.
Sénégalaisement vôtre
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